

NICOLAS DAUTRICOURT & JUHO POHJONEN 9
Vous reconnaissez-vous dans une tradition violonistique ?
N.D. :
Je ne me suis pas posé la question de la tradition. J’écoute beaucoup de
musique, de tous les styles, mais j’avoue avoir entendu peu d’interprètes, peu de
disques dans ce répertoire. Pour moi, le principe même d’une école de violon est
quelque chose de restreignant.
Je déchiffre donc la musique, souvent d’abord au piano, avant le violon. Puis je la
joue comme je la ressens. «Ayez unbeau chant et votremusique serabelle », comme
recommandait Haydn à ses élèves. Mon sens musical s’est forgé par l’écoute,
l’étude et la pratique d’une matière musicale extrêmement vaste et contrastée. Je
me fais donc aujourd’hui confiance quant à ma capacité à synthétiser l’ensemble
de ces connaissances et de ces émotions, afin de servir la musique et non l’utiliser
à mon profit. En vérité, si l’on aime la musique que je joue, peu m’importe que l’on
reconnaisse mon violon.
Vous avez étudié auprès d’András Schiff. Avez-vous été marqué par une
école de piano en particulier ?
J.P. :
J’ai eu, en effet, le plaisir d’étudier l’œuvre de Bach avec András Schiff. Je pense
qu’il a trouvé une voie pour jouer sa musique, avec une superbe liberté artistique.
Une liberté qui paraît toujours authentique, ce qui demeure une grande source
d’inspirationpourmoi. Cela étant, je neme revendique pas d’un style de jeuou d’une
école de piano. Et si j’ai reçu des influences, ici et là, ce fut plus souvent d’interprètes
qui ne sont pas des pianistes.