

GARY HOFFMAN 13
Comment abordez-vous le grand écart de temps - un quasi quart de siècle -
qui sépare les deux Sonates ?
J’ai joué toute la musique de chambre de Brahms, aussi je conçois les deux
Sonates comme appartenant à ce vaste ensemble. Evidemment il y a de grandes
différences entre ces deux opus, l’écriture pour le violoncelle, le rapport avec le
piano, la construction de chacune des Sonates, tout cela est complètement
différent. Pourtant en jouant les Trios, les Sextuors, les Quintettes, les parties
de violoncelle des Symphonies dans les orchestres d’étudiants, je me suis aperçu
qu’il y avait beaucoup de correspondances entre les diverses écritures pour mon
instrument dans toutes ces œuvres. Par exemple, dans la Sonate en mi j’entends
beaucoup d’échos du Sextuor en Sol majeur. Le début du premier thème du premier
mouvement me rappelle les variations du troisième mouvement du Sextuor.
Lorsque je donne des master classes, je m’aperçois que les élèves qui viennent
travailler la Sonate en mi ne connaissent pas le Sextuor en Sol, or la musique de
chambre de Brahms est un seul continent où tout est lié, pour ainsi dire un même
paysage. La Deuxième Sonate est très proche du Trio op. 101 ou de la Troisième
Symphonie. Si l’on connait tout cela, on comprend mieux le fonctionnement
interne de cette musique. Le fait d’avoir joué tant d’œuvres de Brahms composées
entre ces deux Sonates si éloignées dans le temps produit en quelque sorte l’effet
inverse : elles ne me semblent pas si différentes que cela.