

14 ROBERT SCHUMANN
Venons-en enfin aux
Danses des Compagnons de David
. «
Ces danses
sont tout autre chose que le Carnaval et se dissimulent derrière lui comme
des visages sous le masque
» : que pensez-vous de cette remarque de
Schumann à Clara dans une lettre du 18 mars 1838 ?
C’est une phrase très importante. Elle se situe au moment d’un échange entre
Schumann et une jeune fille qui lui dit trouver trop de ressemblances entre les
Davidsbündlertänze
et le
Carnaval
, et préférer ce dernier. Clara n’a alors que 19 ans ...
Après la mort du compositeur, elle confiera un jour à Brahms qu’elle redécouvre
toute la beauté et la profondeur de l’Opus 6.
Deux ans après l’Opus 9, les
Davidsbündlertänze
sont encore un carnaval, mais
un « carnaval intérieur ». Plus de titres : tout un « théâtre musical », toute une
mise en scène que l’on trouvait déjà dans les
Papillons
et surtout dans le
Carnaval
disparaissent. Schumann tombe tous les masques, se met à nu et va vraiment à
l’essentiel des choses. Ne restent que ces deux personnages, Eusebius et Florestan,
comme si le musicien avait voulu – c’est en tout cas ma perception – partir du
Carnaval
et aller plus loin, plus profondément dans l’introspection ; aller plus loin
aussi dans une certaine liberté compositionnelle, déjà grande dans l’opus 9. Les
Davidsbündlertänze
recèlent des choses extraordinaires, d’une invention, d’une
originalité absolument folles, et c’est sur ce terrain-là que les Davidsbündler
combattent maintenant les Philistins, et non plus en une marche tapageuse.