

24 BACH / ISOIR_TRANSCRIPTIONS
Plusieurs années donc et au sortir de la classe de Toulouse, je retournai voir André
de passage à la Cathédrale d’Auch où il donnait un récital avec le violoniste Gérard
Poulet. Il m’avait donné rendez-vous et je lui jouai quelques pièces. Il me dit :
« que puis-je vous apprendre après Xavier Darasse? » Je n’avais que dix-neuf ans et
j’avais encore tant de choses à apprendre mais voilà, mes études d’orgue étaient
officiellement terminées... André me prît un an au conservatoire d’Orsay. Xavier
Darasse, grand musicien et pédagogue, m’avait fait travailler en profondeur une
part substantielle du répertoire d’orgue mais tout était allé si vite. André Isoir, sans
vraiment bouleverser mon style de jeu, me permit de « décanter les choses », de
prendre du recul, de faire sonner librement les instruments (et de s’y intéresser
d’un point de vue de la facture), de desserrer quelque peu le « corset » études,
didactique etc... Et tout cela pendant une seule année de pur plaisir de faire de la
musique sous sa direction. Etais-je cependant suffisamment armé pour entamer
une carrière d’organiste à vingt ans alors que les premiers concerts arrivaient ?
Je restai encore une peu plus dans sa classe d’improvisation toujours dans le cadre
du conservatoire d’Orsay. Cette classe était une vraie famille. Nulle rivalité entre
nous, nulle tension. Nous étions une bande de copains, de frères et sœurs. Cette
classe d’improvisation avait lieu une fois par semaine à l’église réformée d’Auteuil
(où Madame Isoir était organiste) dans le XVIe arrondissement. Nous venions y
exercer notre oreille, harmoniser du grégorien, des chorals et du Duke Ellington, se
planter lamentablement dans des strettes de fugue (surtout moi...), improviser de
grands intermèdes symphoniques, se raconter nos joies et nos petits malheurs, se
faire réparer sa voiture (par le maître) pour ceux qui en possédaient une, demander
un conseil de bricolage ou de plomberie (toujours par lemaître). Nous adorions par
dessus tout l’humour ravageur d’André, toujours à propos.