

18 CHOPIN_POLONIA
Vous vous êtes concentré sur les grandes polonaises (op. 26 op. 40, op. 44,
op.53,
Polonaise-Fantaisie
), à l’exclusion des opus de jeunesse, pourquoi ?
J’aimerais beaucoup enregistrer les premières polonaises, j’avais d’ailleurs pensé
en ajouter quelques unes ou au moins une, mais je me suis ravisé, car il y a bien
cinq ans entre la dernière polonaise écrite à Varsovie et la première des grandes
polonaises qu’il composera à Paris. C’est un autre monde, on est dans l’exil, dans la
douleur, le désespoir, une protestation en musique devant cette liberté bafouée. Il
fallait plutôt demeurer dans cet univers si singulier.
Comment concevez-vous le grand poème qu’est la
Polonaise-Fantaisie
?
C’est quasiment la synthèse de toutes les autres. C’est à la fois une épopée et
une élégie, c’est la colère et l’acceptation et puis aussi quelque chose de l’ordre de
l’improvisation, ce qui ne rend pas l’enregistrement de cette œuvre aisée. On sait
quel improvisateur d’exception était Chopin, il changeait volontiers ses propres
notes, il faisait souvent improviser ses élèves et dans la
Polonaise-Fantaisie
l’écriture,
trouvée et non cherchée, tient une grande part comme dans la première partie :
littéralement un nouvel univers sonore s’ouvre devant nous, avec cette phrase qui
semble ne devoir jamais s’interrompre, jusqu’à cette quintessence jubilatoire des
dernières mesures. En la jouant je voulais donner le sentiment que je la découvrais.