

8 BEETHOVEN
La
Grande Fugue
, à la somptuosité sonore quasi orchestrale, s’entend comme un
tout, inébranlable, vertigineux, révolutionnaire : Beethoven recule jusqu’au gouffre
les limites proprement musicales qu’il s’inflige. C’est une immense progression
symphonique,mais point, sans doute, uneœuvre de total triomphe, car l’exultation
de ses phases d’élan ascensionnel conserve presque toujours un caractère de
gravité suprême, une résonance, une couleur profondément tragiques. un geste
inflexible, puissant, non grandiloquent, que le recours à la fugue : c’est un coup de
génie de Beethoven qui lui fait retrouver, au travers d’une telle « distance » formelle,
l’expression même de l’imprévisible, du multiple, de l’autonome.
Son langage spécifique est un langage des limites, il possède
le droit suréminent du chef-d’œuvre, celui de s’écouler, de
s’interrompre en lui-même.