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FLORIAN NOACK 9 Je partage aussi cette sensation d’équilibre, assez étonnant et presque un peu paradoxal pour un cycle d’ Études transcendantes . On aurait pu s’attendre à une sorte de surenchère sur son prédécesseur ; pourtant celles de Liszt m’ont toujours paru plus extrêmes, plus spectaculaires. Sans doute Liszt avait-il conscience qu’il dépassait dans ses Études tout ce qui avait été jusqu’alors écrit pour l’instrument. En quelque sorte, le dépassement et la transgression font partie de leur identité. En revanche, Liapounov n’est pas un révolutionnaire. Il a une conscience aiguë de tout ce qu’il doit à ces devanciers qu’il admire tant. S’il est capable de lyrisme, de souffle et de bravoure, j’aime imaginer que cette conscience a dû agir comme garde-fou, comme antidote aux excès de toutes sortes, à la virtuosité tapageuse et au romantisme échevelé. Enfin, si sa musique en appelle presque toujours à la haute voltige — sans doute par choix, par sa formation de virtuose —, il me semble que sa vraie nature est davantage celle d’un introspectif. Peut-être se force-t-il un peu dans la frénésie de Lesghinka , dans l’apothéose qui conclut l’ Élégie finale. Mais dans la Berceuse , ou dans Nuit d’été , il me semble entendre sa propre voix, reconnaissable malgré ce qu’elle doit à d’autres.
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