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FLORIAN NOACK 7 C’est en quelque sorte l’œuvre fraternelle d’un homme qui admirait son aîné au point de dédier sa vie à poursuivre son œuvre, à la faire vivre à travers sa propre voix. En ce sens, Liapounov ne s’éloigne pas, me semble-t-il, de l’idéal de transcendance telle que Liszt le conçoit dans ses études : une sorte de transmutation de la difficulté la plus inaccessible en poésie la plus rare, qui ne puisse se cueillir qu’aux confins de la technique pianistique. Mais la ressemblance entre les deux cycles est également trompeuse. De même que deux frères partagent des traits communs, cette ressemblance même révèle leurs différences. Si l’un emprunte à l’autre de nombreux procédés, en particulier dans l’écriture pianistique, la musique, et la personnalité qu’elle révèle, est tout autre, et ce dès la première pièce : quoi de commun entre le fulgurant Preludio de Liszt et la fragile Berceuse de Liapounov ? Aucune de ces deux pièces d’ailleurs n’a de réel équivalent chez l’autre. Personnalité sans doute plus introvertie, on ne trouvera pas chez le cadet de réel pendant au Presto furioso de Wilde Jagd , à la cavalcade étourdissante de Mazeppa . En revanche, le folklore, absent du cycle de Liszt, est évoqué constamment chez Liapounov : le Caucase de Térek et Lesghinka , la Russie orthodoxe de Carillon et du Chant épique , et, en effet, l’ Élégie qui profite de la dédicace à Liszt pour évoquer le style tzigane.
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