12 BRAHMS | SONATES POUR CLARINETTE ET PIANO ∙ TRIO POUR COR Après la luxuriance et la poésie « naturelle » du cor, la passion de Brahms pour la sobre clarinette est d’une nature bien différente, et, dirait-on, plus essentielle. Elle habitera quatre partitions majeures du crépuscule de sa vie, figurant « l’intériorité pure » qui marquait déjà le jeune musicien des Ballades, et qui créera comme un arc presque quarante années plus tard avec ses derniers Intermezzi pour piano, le Quintette pour clarinette et cordes op.115 et les deux Sonates pour clarinette et piano op.120. Il est symbolique que ces sonates constituent les dernières pages de musique de chambre de Brahms. On songe à Mozart qui traduisit les mêmes caractéristiques méditatives de l’instrument dans son Quintette et son ultime concerto. La clarinette est aussi l’instrument d’une certaine solitude, cette compagne fidèle de Brahms. On sait que les deux œuvres sont « inspirées », avec le Trio op.114 et le Quintette op.115, datés de 1891, par le clarinettiste Richard Mühlfeld, qu’il entend peu de temps avant, à Meiningen. Rencontre qui coïncide chez Brahms avec une période plutôt morne. La clarinette et l’art de Mühlfeld le réveilleront ; quatre partitions majeures naîtront ainsi pour elle et deux aussitôt, le Trio et le Quintette ! Les deux sonates attendront l’été 1894 à Bad Ischl où Brahms aimait résider l’été. Lui et Mühlfeld en donneront la création privée en septembre 1894, suivie d’une audition en présence de Clara en novembre. Floraison inédite et spectaculaire pour des pages qui sont le contraire de toute extériorité. Nul public n’y est visé, seule la musique comme pur écho de soi. Contemporaines des trois tardifs cycles pianistiques, les opus 117, 118, et 119, elles empruntent un ton mélancolique, prégnant déjà dans le Trio et le Quintette, mais un détachement aussi, tel un regard lointain, au-delà de toute nostalgie, ce regard qui sera celui de ces ultimes pièces pour piano.
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