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GEOFFROY COUTEAU, AMAURY COEYTAUX, RAPHAËL PERRAUD, NICOLAS BALDEYROU 9 En cela Brahms est l’anti-Beethoven, qui tord la matière musicale et la forme ensemble quand lui les associe souplement. Attitude « féminine », osons l’image, qui « absorbe » tout conflit au profit de l’harmonie salvatrice. Elle se traduit au mieux dans ses quatre concertos, où l’élément « brillant », extérieur, est toujours mis au service de l’ensemble et n’a sa raison d’être que par rapport à lui. Car le maître mot de Brahms, c’est l’ intériorité ; point de musique sans elle ; elle est l’alpha et l’oméga de son œuvre et la cause de sa précocité si étonnante. C’est elle qui dut frapper Robert et Clara Schumann quand ils le rencontrèrent en 1853, cette conscience et ce sacerdoce stupéfiants chez un jeune homme de 20 ans si royalement beau au piano comme dans la vie ; mais qui n’en avait cure. Chez lui, aucune séduction, jamais. Même Schumann sut être plus léger. Un comble. Brahms n’a pas attendu le poids des ans pour être sage etmûr. Sérieux . (Finalement, les Quatre Chants sérieux , sa dernière grande œuvre, datée de 1896, un an avant sa mort, porte un titre qui résume toute sa production, qui n’est qu’un grand chant sérieux !) Il semble qu’il le fut d’emblée. Il n’est qu’à entendre ses Ballades de 1854. Elles pourraient dater aussi bien de quarante années plus tard. Brahms nous offre ainsi le spectacle étonnant et unique d’un génie qui fut toujours le même. Grave. « La vie est grave, il faut gravir », écrit Reverdy. On pourrait appliquer cet adage à Brahms, qui gravit tout, tout de suite.

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