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14 PROKOFIEV | COWELL Vous évoquez les influences françaises dans la musique de Prokofiev. Ne pensez-vous pas en premier lieu au legs russe ? Curieusement, je ne vois pas dans cette musique, un lien avec Tchaïkovski, par exemple, pourtant auteur de trois immenses ballets. En revanche, une certaine ironie, une dureté du langage évoque Chostakovitch, celui de la célèbre Suite pour orchestre de Jazz n°2 . Je pense à l’épisode dans lequel Cendrillon se rend au bal. Mais l’écriture de la partition est plus fouillée que celles pour piano de son compatriote. Vous avez travaillé également avec les partitions d’orchestre. Qu’est-ce que cela implique en termes de choix de phrasés, de tempi et de dynamiques ? Je tiens à préciser que ma démarche n’est pas celle d’un transcripteur. Je joue ce que Prokofiev a composé. Au piano, je pense, en effet, à l’orchestre et, en premier lieu, au dosage des dynamiques. Elles ne sont pas si importantes que cela dans ce ballet ? « Forte » au piano signifie « fort »… Mais, à l’orchestre ? Cela peut vouloir dire « plus ample » et accroître considérablement les possibilités de couleurs. De même, lorsque Prokofiev indique « staccato » sur la partition et ajoute aussitôt « avec élégance », nous ne sommes pas loin de l’oxymore… L’interprète doit trouver le sens réel des nuances et proposer sa propre conception tout en préservant la narration. Pour ce qui concerne les tempi, la problématique est différente. A l’orchestre, certains tempi rapides paraissent évidents. Mais respectés tels quels, au piano, ils rendent difficilement compréhensibles la complexité et les subtilités de la musique de Prokofiev. De fait, je choisis des tempi parfois un peu plus lents.

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