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5 CLÉMENT LEFEBVRE Ses deux premiers impromptus opus 7 assortis de la mention « à la Mazur », dans le droit fil de ses Dix Mazurkas opus 3, puisent de toute évidence leur source chez Chopin. Entre 1891 et 1895, Scriabine compose ces huit impromptus. Quelles sont leurs particularités et son écriture évolue-t-elle au terme de cette courte période ? Avec la Mazurka, Scriabine est passé par cette phase d’emprise, mais aussi d’appropriation d’un genre appartenant typiquement à Chopin. Certains de ses Impromptus en ont l’allure, non seulement ceux de l’opus 7, mais également l’opus 14 n°1. Ils ont cette simplicité de discours, ce charme immédiat et désarmant qui me touchent. L’opus 10 n°1 est d’une mélancolie poignante et d’un grand raffinement. L’opus 12 n°1 est un tourbillon enivrant. Le second de cet opus est empreint d’un pathétisme appuyé et par son intensité expressive si particulière, il représente bien le compositeur dans sa jeunesse. La douleur contenue de l’opus 14 n°2 est bouleversante. Si l’ombre de Chopin plane au-dessus d’eux, l’écriture de Scriabine témoigne opus après opus d’une manière de concevoir le son de plus en plus personnelle, laissant apparaître des harmonies plus saillantes, voire violentes. De leurs combinaisons de registres émanent des résonances inouïes, en demi-teintes. Dans l’opus 12 n°1, il introduit une polyrythmie donnant à sa musique ce mouvement intérieur et cet inébriant élan caractéristiques du style qu’il développera par la suite.

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