LDV141

7 CLÉMENT LEFEBVRE Si les Impromptus nous donnent à entendre la beauté du son pianistique, à l’instar de ceux de Chopin, cette Sonate n’a-t-elle pas une dimension orchestrale ? Son écriture n’est par endroits pas du tout pianistique et bien au-delà de l’instrument, Scriabine va avec elle au-delà même de l’orchestre. Elle a un son, une atmosphère très intérieure qui échappent à la matérialité. Sa poésie intangible émane de la plasticité de sa matière sonore, ce qui peut paraître contradictoire avec ses mots consignés dans l’un de ses carnets de notes : « plus une chose est poétique, plus elle est réelle ». Mais sa notion de la réalité n’est pas la nôtre, elle ne repose pas sur le concret ! Dans cette Sonate qui porte encore quelques traces de Chopin apparaît une nouvelle influence. Scriabine ouvre plus grand le champ des possibles : il élargit l’espace sonore, le traitement harmonique, introduit le leit motiv par le rappel du thème initial entre les troisième et quatrième mouvements, utilise l’hyperchromatisme dans le finale où l’on retrouve le thème de l’andante, luimême conçu comme une ligne infinie…autant d’éléments wagnériens, marqueurs essentiels de cette sonate selon moi.

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