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8 DEBUSSY ∙ MURAIL | RÉVOLUTIONS Vous évoquez Liszt, l’un des fondateurs de la technique moderne du piano. Comment définiriez-vous celle des pièces pour le clavier de Tristan Murail ? J’ai récemment créé deux nouvelles œuvres : Mémorial et Résurgence , deux pièces séparées, mais qui appartiennent à un cahier d’œuvres. Le « modèle » sous-jacent de Résurgence est celui des Jeux d’eau de la villa d’Este de Liszt et l’hommage ne concerne plus la célèbre villa de Tivoli, non loin de Rome, mais la Sorgue, une rivière du Vaucluse, proche du domicile du compositeur. Toutefois, pas plus que dans l’œuvre de Liszt, il ne saurait être question, chez Murail, de musique descriptive. Cela va bien au-delà, comme chez tous les grands compositeurs. La fluidité s’impose dans la musique de Tristan Murail. Elle fait oublier une technique virtuose dans les traits ou les accords alternés. Dans Mémorial , les strates musicales nécessitent des sauts gigantesques que l’on ne doit pas suspecter à l’oreille. C’est une musique écrite par un grand connaisseur du piano. L’écriture proportionnelle selon l’expression du compositeur – c’est-à-dire le placement des notes par rapport à des repères visuels matérialisant la pulsation générale –, lui permet de jouer avec une certaine liberté « écrite », tout en gardant une grande précision rythmique. Tout y est scrupuleusement indiqué – à l’instar de Debussy –, et si l’interprète ressent cette liberté à l’intérieur d’une pulsation régulière, chaque détail rythmique et mélodique doit être parfaitement réalisé.

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