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6 RAVEL ∙ L'ŒUVRE POUR PIANO SEUL Le Tombeau de Couperin composé pendant la Grande Guerre porte-t-il les stigmates de cette tragédie, ou au contraire rassemble-t-il « six danses imperturbablement souriantes et sereines » comme l’écrit Vladimir Jankélévitch dans son ouvrage consacré à Maurice Ravel ? Le Tombeau de Couperin , commencé juste avant la guerre, est un hommage à la musique du XVIII e siècle que Ravel admirait tant. Les dédicaces de chacune de ses pièces à un soldat mort au front, attribuées en 1917 à la fin de leur composition, ont en fait peu de choses à voir, si ce n’est rien, avec la nature de leur musique, pas plus que la guerre n’en a été l’inspiratrice à l’origine. On ne peut pas dire que cette œuvre soit triste, pathétique ou tragique. « Imperturbablement souriante » ? Non plus. La seule pièce qui n’ait rien de souriant est selon moi la Fugue : son sujet comme recroquevillé sur lui-même, interrompu de silences, est suivi aussitôt par son contre-sujet doucement chantant, aux contours plus ronds. Une tension douloureuse naît de cette dialectique entre l’ascèse et le lyrisme. Sa fin dans son dénuement laisse affleurer un sentiment d’immense solitude.
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